Tiken Jah Fakoly ;la biographie


Tiken Jah Fakoly

Il suffit de quelques mesures pour s’en persuader : « African Revolution » est un tournant radical dans la carrière de Tiken Jah Fakoly, un album qui va secouer le cocotier de trente ans de reggae africain.
Mais est-ce encore du reggae?
Tiken Jah Fakoly a toujours pris des risques. Dès « Mangercratie », en 1996, il imposait la langue des trottoirs d’Abidjan, dans toute sa joyeuse arrogance, la plus roots qui ait jamais caressé nos oreilles. La plus politique aussi: balançant leurs quatre vérités à la figure des despotes, déstabilisant l’histoire officielle, Tiken rendait coup pour coup à la désinformation et s’imposait comme le porte-parole de millions de jeunes africains. Pas de doute, il s’inscrivait dans la lignée des Peter Tosh et des Bob Marley, la branche la plus noble du reggae : comme eux, il était devenu « la voix des sans-voix ».
Après quinze années de carrière, une Victoire de la Musique et plusieurs disques d’or, Tiken Jah Fakoly semblait n’avoir plus rien à prouver. Son dixième album aurait pu n’être qu’un satisfecit complaisant…Alors comme toujours, Tiken a pris des risques.
Inattendu, excitant, impeccablement produit, « African Revolution » est exactement ce qu’il clame : africain et révolutionnaire.
Révolutionnaire dans la méthode de travail, d’abord. Tiken a fait ses maquettes non plus sur un « riddim » figé, à la manière des Jamaïcains, mais sur la guitare subtile de Thomas Naïm (connu notamment pour son travail avec Hindi Zahra). Passage obligé à Tuff Gong, le studio de Bob Marley à Kingston, pour poser les rythmiques avec trois pointures: Glen Browne (basse), Marc Dawson (batterie) et Mickey Chung (guitare). Puis il y a eu Bamako. C’est là, dans son studio, que Tiken a concocté cette musique à la frontière du reggae et du « blues mandingue ».
Les sonorités magiques des ngoni, kora, soukou (violon à une corde) et balafon nous étaient familières, mais Tiken a su capturer leur âme. Cinq ans d’exil à Bamako lui ont permis  de pénétrer la talentueuse génération des fils de griots qui est en train, là-bas, d’exploser tel que le joueur de ngoni Andra Kouyaté. Ces jeunes loups de la « nouvelle tradition » apportent à la musique de Tiken un lyrisme inédit, un peu amer (Sinimory), et un subtil décentrement de la rythmique jamaïcaine (Marley Foly).
Les producteurs, Jonathan Quarmby et Kevin Bacon (qui ont découvert Finley Quaye et réalisé son premier album), ont su transcender cette rencontre par l’alchimie d’arrangements et d’un mix magique, très éloigné du son jamaïcain. Les instruments africains sont magnifiés, les notes vibrent d’émotions plusieurs fois centenaires. Moins de choeurs féminins, plus aucun cuivre; c’est la guitare acoustique  de Thomas Naïm qui mène le jeu, impatiente et espiègle. Les accords s’enrichissent, les chansons basées sur des guitares/voix sont libérées de la « tyrannie » du  one drop  jamaïcain, les rythmiques se diversifient, du balancement presque caribéen de Votez à l’âpre élégance des arpèges mandingues.
Tiken a écrit la plupart des chansons, assisté parfois de son vieux complice de Zebda, Magyd Cherfi (Il faut se Lever, l’Afrique attend). Je ne veux pas ton pouvoir est un texte de Jeanne Cherhal et Laisse-moi m’exprimer de Mr Toma, espoir de la scène parisienne.
Je dis non, est signé texte et musique de Féfé (Saïan Supa Crew).
Un seul featuring : celui d’Asa, sur Political War, tout illuminé de la grâce naturelle, de la perfection candide de la chanteuse Nigériane.
Africain dans le son, l’album l’est aussi – bien sûr – dans l’intention.
Désormais, c’est au continent noir tout entier que le chanteur s’adresse. « Go to school brothers… intelligent révolution is African éducation » (African Revolution).C’est un appel à une prise de conscience de la jeunesse africaine qui court à travers les chansons: « Personne ne viendra changer l’Afrique à notre place, il faut se lever, lever, lever, pour changer tout ça ». (Il faut se lever)…
Mais la façon dont Tiken aborde le sujet de l’Afrique est devenue plus personnelle.
Ce n’est pas la star qui s’exprime, c’est un homme qui doute: « Ceci n’est qu’une chanson, ça ne changera pas nos vies… » (Je dis non). C’est un homme amer qui voit ses frères se transformer en mendiants: « Je suis revenu après 5 ans d’exil, des millions de jeunes sans boulot, tous la main tendue… » (Vieux père). C’est l’homme qui a tourné le dos au mirage des « montagnes d’argent » et de la politique, et consacre ses cachets aux écoles et aux champs: «Je ne veux pas ton pouvoir, pas besoin de l’avoir, je ne veux pas de ta gloire, je veux l’espoir » ( Je ne veux pas ton pouvoir).
C’est un Tiken plus intime, plus sensible que nous découvrons.
African Revolution s’impose comme un jalon, non seulement pour l’artiste, mais pour toute la scène reggae. Une bouffée d’air frais, exemple qui va donner du grain à moudre à toute la nouvelle génération…
Mais avant tout cet album transcende les genres et projette un son nouveau, ancré dans la tradition et résolument moderne, comme cette Afrique qui ne cesse de nous charmer et de nous étonner.
A suivre la discographie de Tiken Jah Fakoly :
Albums :
DERNIER APPEL  ( 2014 ) 
1. Dernier Appel
2. Human Thing Feat. Nneka 

3. Le Prix du Paradis
4. Diaspora Feat Alpha Blondy
5. Tata
6. Dakoro
7. War Ina Babylon Feat Nneka & Patrice
8. Too Much Confusion Feat Patrice
9. L'Afrique

10. Saya  
AFRICAN REVOLUTION  ( 2010 )
1. African revolution
2. Je dis non!

3. Political war feat. Asa
4. Marley foly
5. Il faut se lever
6. Sinimory
7. Vieux père
8. Sors de ma télé
9. Votez
10. Je ne veux pas ton pouvoir
11. Initié
12. Laisse-moi m’exprimer    
          L'AFRICAIN ( 2007 ) Disque d'or
1.Ouvrez les frontières
2.Ayebada
3.Soldier
4.Foly
5.Viens Voir
          

         COUPS DE GUEULE ( 2004 ) Disque d'or

1.Alou Maye
2.ça va faire mal
3.Plus rien ne m'étonne
4.L'Afrique doit du fric
5.Quitte Le Pouvoir Positive Black Soul
6.Tonton D'america
7.Deme
8.Kuma
9.Où Veux-Tu Que J'aille
10.Sauver
11.Imadjigui
12.Allah
           FRANCAFRIQUE ( 2002 )
1.Missiri
2.Délivrance
3.Politiciens
4.Le Pays Va Mal
5.Africa
6.Le Balayeur
7.Nazara
8.On A Tout Compris
9.Soungourouba
10.Justice
11.Y'en A Marre
12.Francafrique
           LE CAMELEON ( 2000 )
1.Le Pays Va Mal
2.Danga
3.Promesses De Caméléon
4.Justice
5.Baba
6.Allah Tando
7.Y'En A Marre
8.Alpha Conde
9.Politiciens
10.Les Audits
11.Tête De Mule
12.Kafri
            COURS D'HISTOIRE ( 1999 )
1.Ohba Ohba
2.Politqui kele
3.Les martyrs
4.Discrimination
5.Otitelena
6.Nationalite
7.Toubabou
8.Djourou
9.Bognan
10.Sundjata
11.Tata
12.Africa

            MANGERCRATIE  ( 1996 )
1.Délivrance
2.Plus jamais ça
3.Le descendant
4.Don
5.Mangercratie - On a tout compris ...
6.Djeli
7.Crazy world
8.Le descendant - Dub
              LIVES IN PARIS ( 2008 )




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